jeudi 8 mai 2008

The Bitterest Pill...

J’avais évoqué dans un post précédent l’ordonnance de référé défavorable à la Centrale d’achat des Centres Leclerc dans le cadre de la campagne de lobbying destinée à faire bouger le monopole des officines de pharmacie en matière de vente de médicaments. Même si l’ordonnance était défavorable au Galec, on pouvait conclure à une nouvelle victoire médiatique de Leclerc. La Cour d’appel de Colmar (par un arrêt en date du 7 mai) vient de renforcer cette victoire en infirmant l’ordonnance de référé. Elle considère que la campagne menée par Le Galec ne revêt pas le caractère d’une publicité mais plutôt d’une « propagande en faveur d’un changement de législation ». Même si l’on peut comprendre ce que les juges de la Cour d’appel veulent signifier, la différence entre une « publicité » et une « propagande » laisse songeur, si la « propagande » a une finalité mercantile, à savoir la réalisation de profits sur un certain type de produits (en l’espèce les médicaments). Les juges estiment également que le message (de propagande) ne contient pas d’allégation mensongère dès lors qu’il n’est pas possible de considérer que l’allégation de l’effet bénéfique d’une ouverture de la concurrence est manifestement fausse. Quant au dénigrement des pharmaciens d’officine, il n’est pas avéré, et l’image des pilules et des gélules est selon les juges certes un peu agressive, mais elle ne dépasse pas « les limites de ce qui est permis en matière d’expression humoristique ». Cette formule rappelle, si besoin était, l’importance de l’humour, l’ironie, le pastiche et l’exagération dans notre système de valeurs. La conclusion des magistrats de la Cour d’appel de Colmar est donc très claire : l’existence d’un trouble manifestement illicite n’est pas démontrée. Au-delà du cas particulier de la campagne orchestrée par Leclerc, et sans exagérer la portée d’un tel arrêt, il offre une perspective intéressante aux entreprises souhaitant (et ayant les moyens) modifier leur environnement juridique en utilisant divers leviers de communication, et notamment les campagnes de « propagande ».
Merci (une fois de plus) à Cédric "Web Guru" Manara qui m'a transmis le texte intégral de la décision.

lundi 5 mai 2008

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les relations entre Droit de la concurrence et Innovation, sans avoir jamais osé le demander

Les relations entre le droit de la concurrence et l'innovation sont complexes mais passionnantes et de plus en plus d'actualité. Pour une réflexion riche et remarquablement structurée, je vous invite à découvrir la présentation powerpoint de Hanno F. Kaiser, avocat chez Latham & Watkins et professeur à la Benjamin N. Carodozo School of Law. Il précise d'ailleurs sur son blog que "the slides are licensed under a Creative Commons Attribution-Noncommercial 3.0 United States License, so feel free to use whatever you like".
Enjoy !

Le projet de loi sur la modernisation de l'économie : à quand un projet de loi pour moderniser la rédaction des projets de loi ?

Tous les juristes le savent, la lecture d'un projet de loi (ou du texte définitif) est un remède efficace à l'insomnie. Je l'ai encore testé tout rècemment en m'attachant à la tâche quasi sacerdotale de la lecture du Projet de loi de modernisation de l'économie. Certes certaines dispositions peuvent être saluées, comme la transformation du Conseil de la concurrence en Autorité de la concurrence, avec des pouvoirs renforcés (ce qui prouve, si besoin était, le poids croissant du droit de la concurrence comme facteur de risques - et d'opportunités - pour les entreprises), et un pas supplémentaire vers la libéralisation des relations entre fournisseurs et distributeurs (vers la liberté contractuelle). Mais quand une loi a pour ambition d'apporter un souffle nouveau et d'être un levier pour la croissance, comment se satisfaire du caractère - une fois de plus - hétèrogène et labyrinthique du texte ? Comment se satisfaire d'un texte de 60 pages (version imprimée), dont le décryptage relève parfois du tour de force surnaturel ? Comment se satisfaire d'un texte LEGISLATIF contenant des formules telles que "Au deuxième alinéa du III, après les mots "contrats illicites", la virgule est remplacée par le mot "et" (Article 22, 6°) ?